Les cercles de fées du Namib

     La magie des paysages namibiens ne tient pas seulement à leur beauté incontestable. La nuit dans les plaines du Namib, des fées dansent en cercle depuis des millénaires, dessinant ainsi dans le désert de multiples tâches parfaitement rondes totalement dénuées de végétation…
     Des scientifiques, peut-être un peu trop cartésien, ne croient pas aux fées et cherchent donc depuis plusieurs années l’explication rationnelle à ces cercles du Namib. Et autant dire qu’ils auraient été mieux avisés d’en rester à la magie, étant donné la complexité du phénomène. Météorites, plantes toxiques, radioactivité, et bien d’autres théories ont été bien vite laissées de côté.
     Alors comment peuvent bien se former ces cercles « chauves » de 2 à 12 m de diamètre, possédant une couronne de plantes à leur périphérie plus haut que la végétation environnante, espacés de manière plus ou moins régulières dans des zones aux précipitations avoisinant les 50-100 mm par an, et ayant une durée de vie moyenne de 40 ans ? Deux explications, complémentaires l’une de l’autre, tendent à s’imposer et à se concurrencer dans la communauté scientifique : l’activité d’une espèce de termite  et la compétition chez les plantes.

     Des colonies de termites Psammotermes allocerus sont retrouvées sous la surface de la quasi-totalité des cercles de fées. Cette espèce, contrairement à d’autres, ne bâtit pas de termitières à l’air libre, mais creuse des galeries souterraines. Son appétit pour les jeunes racines expliquerait l’impossibilité des plantes à pousser dans le périmètre de leurs galeries. De plus, le peu d’eau tombé dans le désert ruisselle sous le sol car il n’est pas consommé par les plantes ; ce qui permet aux termites d’avoir à disposition des réserves d’eau pour faire face aux sécheresses. La couronne d’herbes à la périphérie peut-elle croître grâce à l’eau disponible en sous-sol sur les côtés du cercle.

     Cette théorie ne fait pas l’unanimité dans le monde scientifique, certains pensant qu’on ne distingue pas la cause et la conséquence. En d’autres termes, si les termites habitent là, c’est qu’ils y trouveraient des conditions favorables, mais ils ne seraient pas les « architectes » de ces formes circulaires. Pourquoi donc ces cercles seraient présent uniquement dans des régions désertiques où il ne pleut ni trop ni pas assez, et espacés si régulièrement entre eux ?

     Dans certaines zones du désert namibien, l’herbe pousse de façon uniforme. Mais là où les précipitations ne suffisent pas, certaines plantes absorbent plus d’eau que leurs voisines et entraînent à terme leurs morts. Se crée alors des zones sans végétation dans lesquelles les ressources en eau et en nutriment augmentent car elles ne sont pas consommées directement par l’herbe. A la périphérie, les plantes qui ont remportées la compétition disposent par conséquent d’une réserve en eau accessible et qui ne s’évapore que lentement car en sous-sol. Ceci expliquerait pourquoi lors de bonnes saisons des pluies les cercles de fées ont légèrement tendance à rétrécir ou disparaitre, la compétition pour l’eau étant moins « féroce ». Les colonies de termites profiteraient donc de ce mini-écosystème ; mais participerait aussi activement à l’entretenir en dévorant les jeunes pousses à l’intérieur du cercle.

     Le mystère n’est donc pas totalement résolu qu’en au rôle de chacun dans la formation de ces cercles. Cela dit, si une nuit vous êtes réveillé par du bruit suspect aux abords de votre camp dans le Namib, prenez garde à ce qu’il ne s’agisse pas d’une hyène, et levez-vous pour scruter la nuit… Peut-être apercevrez-vous un groupe de fées danser sous le ciel étoilé.